Espèces & habitats de l'estran
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Herbier de zostères
Des plantes à fleurs à ne pas confondre avec des algues :
Les zostères sont des plantes aquatiques marines (phanérogames). Elles possèdent des fleurs, des graines et un système racinaire (en rhizome). A l’instar des plantes à fleurs terrestres, les zostères connaissent un développement saisonnier. Le printemps et l’été en raison d’une température et d’un ensoleillement plus important sont des périodes propices à la croissance de leurs feuilles et à la production de leurs graines. A l’inverse, la conjugaison de conditions hydrologiques plus fortes, la baisse de la température et de la luminosité en automne, entraînent alors la chute des feuilles de zostères. Dès lors on les retrouve en plus importante quantité échouées sur le haut de plage, dans la laisse de mer.
Les zostères se développent sur des fonds sédimentaires sableux et sablo-vaseux intertidaux et infralittoraux (du bas de l’estran à 3-4 mètres de profondeur) dans les zones abritées. La faible profondeur et la luminosité sont deux conditions importantes dans le développement des zostères, sans quoi elles ne peuvent effectuer une activité photosynthétique.
Cette plante à fleur s’étend et prend la forme d’un herbier, parfois dense, comparable à une prairie terrestre. Le long des côtes de la Manche et de l’Atlantique française deux espèces sont présentes : la zostère naine et la zostère marine (respectivement zostera noltei et zostera marina). Sur les côtes méditerranéennes, les herbiers sont constitués de Posidonie (Posidonie oceanica).
Des Hot-spots de biodiversité aux services écologiques majeurs :
Malgré une petite superficie (0.15% des fonds marins de la planète), les herbiers admettent des rôles écologiques considérables. Ils sont qualifiés « d’ingénieurs d’écosystème », en ce sens que leur fonctionnement modifie et conditionne significativement leur environnement. Le bon état écologique et le développement d’un herbier de zostères apportent de nombreux bénéfices :
- Les herbiers limitent la mise en suspension des sédiments, en ralentissant la vitesse des courants, ce qui par conséquent augmente localement le taux de sédimentation. Au fil du temps et de leur densification, les herbiers interviennent localement dans l’hydrodynamisme, en atténuant la houle et les vagues. Les zostères sont des remparts naturels jouant un rôle dans la stabilisation des plages et dans le renforcement du cordon dunaire. Pour toutes ces raisons, les herbiers de zostères participent à la protection du trait de côte et sont des habitats clés dans la lutte contre l’érosion côtière.
- L’herbier est également un habitat privilégié pour la faune aquatique. Ce sont des lieux de reproduction, de nurseries, et d’abri pour de nombreuses espèces aquatiques (crustacés, poissons, crevettes roses, araignées de mer, seiches, hippocampes, buccins, palourdes …).
Les feuilles des herbiers abritent une microflore épiphyte (organisme qui pousse en s’appuyant sur une autre plante) telles que les microalgues. Dans cette prairie sous-marine se superposent les faunes propres aux substrats meubles et les faunes qui sont normalement plus spécifiques aux substrats durs. Retenons que cet habitat concentre 6 fois plus d’espèces que sur un fond marin nu !
- Les zostères naines à marée basse sont également de véritables garde-mangers pour les oiseaux d’eau côtiers (limicoles et anatidés) en hivernage sur les côtes françaises. Les feuilles de zostères constituent une ressource nutritionnelle essentielle dans leur survie et dans le maintien des effectifs des populations de ces oiseaux, notamment des bernaches cravants, des canards siffleurs et des cygnes.
- Les herbiers sont des puits de carbone atmosphérique et organique. En captant 10 % du carbone océanique mondial, il va sans dire que ce sont des alliés dans la lutte contre le dérèglement climatique.
Un habitat riche mais menacé :
Tout comme les champs de blocs ou les récifs d’hermelles, les herbiers de zostères sont vulnérables et ne sont pas exemptes des pressions naturelles et anthropiques. Les herbiers sont sensibles aux anomalies et aux fortes variations de température, salinité, turbidité : tels que des rejets d’eaux anormalement chaudes et/ou douces, canicule, travaux portuaires entraînant une remise en suspension des sédiments voire un ensablement de la surface de l’herbier, tempêtes … Aussi, les pollutions (engrais, eaux usées, épandages, peintures) provoquent une eutrophisation et une anoxie (diminution de l’oxygène) du milieu et se révèlent dommageables à la survie ou au développement de l’herbier. Enfin, la plaisance (ancrage des bateaux au mouillage) et la pêche à pied (principalement des palourdes), sont des forçages anthropiques préjudiciables à la croissance de l’herbier puisqu’elles entraînent un décapage du substrat et mettent à mal le système racinaire.
AVIS AUX PÊCHEURS À PIED
Le ratissage des herbiers pour la récolte des coquillages fouisseurs est à proscrire. En Bretagne, cette pratique est interdite. Il est préférable de contourner les zones d’herbiers, ou à défaut de pratiquer une pêche au doigt !
POUR EN SAVOIR PLUS
Téléchargez notre fiche « Les herbiers, un habitat fragile et méconnu »
Herbier de zostères à la pointe de Bilfot dans les Côtes d’Armor – Franck Delisle
Fonctionnalité de l’habitat – Life Marha – OFB
Herbier de zostères – Bourcefranc-le-Chapus en Charente-Maritime – Violaine Coulange
Vidéo
Quelques bonnes pratiques de pêche à pied : la palourde